Etre surpris par la prescription biennale

Vous venez de découvrir qu’en droit des assurances la prescription est de deux ans.

Vous avez été victime d’un sinistre, le temps a passé, ou votre assureur vient de se manifester pour déclarer que votre demande est prescrite et vous vous interrogez.

Pour savoir si votre action est prescrite, il convient tout d’abord d’examiner de quelle garantie dépend votre sinistre.

  • S’il s’agit d’un sinistre classique, incendie, dégat des eaux ou vol, le point de départ de la prescription est toujours l’évènement constitutif du sinistre.
  • S’il s’agit d’une action contre un responsable, voisin, bailleur, ou professionnel et autres dont vous souhaitez engager la responsabilité, le point de départ est l’action en justice engagée contre ce responsable.
  • S’il s’agit d’une assurance emprunteur le point de départ de la prescription est fixé à la date du refus de garanti par l’assureur ou du premier acte de poursuite du banquier pour le paiement de l’emprunt.

L’article L 114-2 décrit les modes d’interruption de la prescription, qui sont la désignation d’expert, la lettre recommandée avec accusé de réception et un acte d’huissier, commandement ou assignation.

Il convient de bien comprendre le mécanisme de la prescription.

A compter du sinistre chaque évènement ci-dessus décrit va relancer un nouveau délai de 2 ans.

  • 1/ La désignation d’expert : La cour de cassation considère que toute désignation d’expert emporte interruption de la prescription, mais cette interruption ne peut avoir d’effet contre l’assureur que si celui-ci a été convoqué ou a participé aux opérations d’expertise (Cass 1ère civ., 21 oct. 2003).
  • 2/ l’envoie d’une lettre recommandée, dans laquelle l’assuré réclame le paiement de l’indemnité ou l’exécution du contrat fait également courir un nouveau délai de deux ans.

Attention le destinataire de la lettre doit être ou l’assureur ou son agent, mais pas le courtier ni l’expert de l’assureur qui n’est pas son mandataire.

  • 3/ La délivrance d’un acte d’huissier produit le même effet. En cas d’assignation provoquant un procès, la prescription sera alors suspendue jusqu’à la fin du procès. Le jour de la décision de justice elle recommencera à courir.

Mais attention en cas d’échec du procès l’effet interruptif est anéanti. Ce qui rend toute nouvelle action prescrite. Le danger vaut surtout en matière d’action en référé dont il convient de se méfier.

Il existe quelques moyens de sauver la prescription lorsqu’elle est acquise.

  • Il convient tout d’abord de vérifier que les conditions générales du contrat reproduisent bien les articles L 114-1 et L 114-2 du code des assurances, car la cour de cassation vient de confirmer une jurisprudence désormais acquise selon laquelle, si ces mentions ne sont pas dans le contrat, la prescription biennale ne peut pas être opposée à l’assuré.
  • Il se peut également qu’il ressorte des négociations ou des échanges précédent la fin du délai de deux ans, que l’assureur a délibérément attendu et provoqué. La Cour de cassation admet la responsabilité de l’assureur si l’assuré démontre une « attitude fautive aux fins de laisser volontairement expirer le délai de prescription » (Cass. 1 re civ., 7 juin 1988) Mais attention cette attitude fautive est toujours difficile à démontrer.

Ainsi lorsqu’un assureur a écrit avant la fin du délai de deux ans, qu’il prenait en charge le sinistre, toute reconnaissance de garantie, tout paiement même partiel interrompt la prescription.

Toute reconnaissance de garantie et tout paiement intervenant après que la prescription soit acquise, démontre que l’assureur y a renoncé, et l’action est alors soumise à la prescription de droit commun de 5 ans.

Ou  lorsqu’un assureur accepte la mise en œuvre ou la reprise d’une expertise alors que la prescription est acquise, il est sensé y avoir renoncé.

Conclusion attention la prescription est le premier et le pire piège en matière de sinistre.

jcr