Dans de nombreux contrats, l’assuré est invité à déclarer la surface des locaux qu’il occupe ou dont il est propriétaire.
Le piège dans lequel tombe fréquemment les assurés se trouve dans le mode de calcul. Alors que tous les usages se réfère à la surface habitable, les contrats d’assurance des propriétaires non occupant imposent de fournir la surface tenant compte de l’épaisseur des murs, y compris de toutes les pièces, même les toilettes et les cuisines, les caves les sous-sols et les greniers.
Dans ce calcul, pour l’assureur, toutes les surfaces du bâtiment entrent en compte, y compris les étages ou mezzanines.
De très nombreux assurés se font piéger par ce mode de calcul auquel ils ne prêtent pas suffisamment attention.
L’article L 113-2 du code des assurances dispose que :
- « L’assuré est obligé :
…2° De répondre exactement aux questions posées par l’assureur, notamment dans le formulaire de déclaration du risque par lequel l’assureur l’interroge lors de la conclusion du contrat, sur les circonstances qui sont de nature à faire apprécier par l’assureur les risques qu’il prend en charge »
Il sera également rappelé que l’article L 112-3 du code des assurances dispose que : « Lorsque, avant la conclusion du contrat, l’assureur a posé des questions par écrit à l’assuré, notamment par un formulaire de déclaration du risque ou par tout autre moyen, il ne peut se prévaloir du fait qu’une question exprimée en termes généraux n’a reçu qu’une réponse imprécise ».
Depuis la réforme du 31 décembre 1989, l’assuré n’a plus d’obligation de déclaration spontanée des éléments du risque pouvant influencer l’appréciation de l’assureur, il n’a plus qu’à répondre aux questions posées par l’assureur.
Depuis un arrêt de la chambre mixte du 7 février 2014, le temps des déclarations pré-imprimées est révolu. (Chambre mixte 7 février 2014 N° de pourvoi : 12-85107) l’assureur ne peut se prévaloir de la réticence ou de la fausse déclaration intentionnelle de l’assuré que si celles-ci procèdent des réponses qu’il a apportées aux questions précises qui lui ont été posées.
UNE DECLARATION PRECONTRACTUELLE
Il appartient à l’assureur, qui invoque une déclaration erronée de son assuré, de démontrer que l’assuré a répondu à une question précise de l’assureur.
Pour apprécier la valeur des déclarations de l’assuré, il convient de connaitre la question qui lui a été posée. A défaut aucune fausse déclaration ne peut être imputée à l’assuré.
La question est de savoir si l’assureur a posé à son assuré une question claire et précise portant sur la notion de surface totale bâtie lui permettant d’y répondre de manière correcte et de ne pas confondre cette notion de surface totale bâtie avec la notion de surface habitable.
Les assureurs utilisent des outils d’évaluation des risques qui sont totalement obscurs pour les assurés.
Ainsi pour les locataires il est généralement réclamé l’indication du nombre de pièces du bien occupé, avec pour mode de calcul des définitions qui se trouvent dans les conditions générales. (Les salons chambres cuisines etc., mais pas les caves ni les greniers, les pièces de plus de 20 ou 25 m² devant être déclarées comme 2 pièces, etc…)
Pour les propriétaires non occupants (appelés PNO) c’est la surface totale du bâtiment qui est généralement réclamée, avec les murs extérieurs outre les éventuelles mezzanines. On l’appelle le plus souvent la surface développée.
Par exemple :
- Contrat ALLIANZ : SUPERFICIE DEVELOPPEE
Surface totale additionnée des rez-de-chaussée et de chacun des niveaux de l’immeuble assuré (y compris dépendances, box ou parkings couverts, caves, sous-sols, greniers, combles, utilisés ou non] en tenant compte de l’épaisseur des murs extérieurs, - Contrat AXA SURFACE TOTALE DECLAREE :
C’est le total, y compris l’épaisseur des murs, des surfaces du rez-de-chaussée, des étages, des box et parkings couverts, caves, sous-sols, greniers, terrasses et balcons.
Toutefois, les box, parkings couverts, les terrasses, balcons et, s’ils sont inhabitables, les greniers, combles, caves, sous-sols sont comptés pour moitié de leur superficie. - Contrat GROUPAMA : SURFACE DÉVELOPPÉE :
surface additionnée des dimensions extérieures des différents niveaux du bâtiment, à savoir :
• totalité de la surface pour les dépendances y compris boxes pour voitures à l’extérieur des bâtiments, caves, sous-sols, parkings souterrains, rez-de-chaussée, étages,
• pour moitié de leur surface réelle pour les combles et greniers. - Contrat MATMUT :
Il convient de comptabiliser :
toute pièce d’une surface égale ou supérieure à 9 m² (les cuisines, entrées, salles de bain, wc, débarras, couloirs, garages, greniers et sous-sols non aménagés ne sont pas pris en compte), une pièce principale, pour une seule pièce, dès lors que sa surface est inférieure à 30 m². Une pièce de plus de 30 m² compte pour 2 pièces, de plus de 60 m² pour 3 pièces… › par exception, une véranda pour une seule pièce quelle que soit sa superficie.
la surface habitable des locaux d’habitation, Il s’agit de la surface additionnée des différents niveaux des locaux à usage d’habitation de l’occupant y compris les combles et sous-sols aménagés (la surface des dépendances n’est pas prise en compte).
– si le bien assuré est une maison, sa surface totale, Il s’agit de la surface habitable à laquelle il convient d’ajouter la surface des caves, combles et sous-sols non aménagés dès lors qu’ils sont situés au-dessus ou au-dessous des locaux à usage d’habitation (la surface des dépendances n’est pas prise en compte).
la surface totale des dépendances, Il s’agit de la surface additionnée des différents niveaux mis à disposition de l’occupant.
Chaque assureur définit différemment la surface à déclarer, l’assuré profane en assurance ne peut pas imaginer ou inventer la surface à déclarer si la définition qui se trouve dans les conditions générales ne lui a pas été précisée.
Pour opposer à l’assuré une erreur de déclaration, c’est-à-dire une erreur dans la réponse à la question posée, il convient de vérifier la question posée par l’assureur et plus encore que celle-ci reprenne bien la définition contractuelle.
En effet, le contrat d’assurance n’est pas un contrat instantané, préalablement à sa rédaction et sa signature, les questions sont posées à l’assuré en phase précontractuelle, avant que le contrat ne soit seulement rédigé et signé.
Le plus souvent pour ne pas dire toujours, au moment où la question est posée à l’assuré aucun contrat n’a été rédigé ou signé, aucune condition générale ne lui a été remise.
Comment pourrait-il répondre correctement s’il ignore la définition qui se trouve dans les conditions générales qui ne lui ont pas encore été remises ?
En tout état de cause et enfin, l’assureur ne devrait pas pouvoir opposer à l’assuré le fait que la définition de la surface totale bâtie figure dans les Conditions générales qu’il a reconnues avoir reçues par sa signature des conditions particulières.
Il faut comprendre ici la critique. Il ne s’agit pas de contester l’opposabilité des conditions générales à l’assuré, ni la validité de la technique des clauses de renvoi lorsqu’il s’agit de déterminer les contours ou les limites de telle ou telle garantie, mais de critiquer le régime des déclarations de l’assuré par clause de renvoi.
Les conditions générales comportent le périmètre et les limites des garanties, précisent les exclusions, les déchéances, mais ne peuvent pas définir par anticipation ce que seraient les déclarations de l’assuré, qui par nature et par essence ne peuvent avoir été données qu’antérieurement à la rédaction et la conclusion du contrat.
Les questions et leurs réponses appartiennent à la phase précontractuelle, et relèvent du régime de l’article L 113-2 du code des assurances. Accepter que les conditions générales visent des déclarations prétendues de l’assuré, ce serait un moyen de contourner l’interdiction faites à l’assureur depuis l’arrêt de la Cour de cassation du 7 février 2014 d’imputer à l’assuré des déclarations préimprimées qu’il n’a jamais faites.
Comment l’assuré peut-il répondre à une question dans un document qu’il va signer si le sens et la portée de sa réponse se trouvent dans un document qui lui sera remis postérieurement ou plus simplement dont il n’est pas établi qu’il ait eu le temps de le consulter préalablement à la réponse qu’il fournit.
A aucun moment, l’assureur n’a indiqué à l’assuré qu’il devait déclarer la surface totale bâtie dont la définition qui figure dans les conditions générales (Page xxx des Conditions générales qui précise qu’elle est la somme des niveaux des surfaces construites, murs compris et non pas seulement la surface au sol.
Par conséquent, aucune déclaration erronée ne peut être imputée à l’assuré en phase précontractuelle, alors qu’il ignore tout des conditions générales contenant la définition des surfaces à déclarer.
En conclusion, la critique est évidente, mais les tribunaux n’ont toujours pas admis ce raisonnement, et les assurés restent impuissants. Espérons qu’ils comprendront un jour.
JCR