Garantie architecte maitrise d’oeuvre et l’art 111-3 du Code de l’urbanisme

Conformément aux conditions générales du contrat l’assureur garantit les dommages subis par les biens du souscripteur lorsqu’ils sont endommagés à l’occasion d’un sinistre.

« Article L113-1 code des assurances :
Les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l’assuré sont à la charge de l’assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police. »

Ainsi les contrat prévoient que l’assureur rembourse, le coût de reconstruction du bien, y compris la vétusté, si l’assuré justifie de la réparation du bien.

Un arrêt a statué sur le principe indemnitaire de l’article L 121-1 du code des assurances qui limite l’indemnisation de l’assuré à la valeur du bien avant le sinistre et sur les dispositions contractuelles en matière d’assurances, rappelle la manière dont on doit évaluer le dommage de l’assuré victime d’un sinistre.

La cour de Cassation a précisé que :(2ème civ 13 sept 2007 L’ARGUS DE L’ASSURANCE DOSSIERS JURIDIQUES N° 7045 26/10/2007)

« Le principe indemnitaire posé par l’article L 121-1 du code des assurances, ne fait pas obstacle, en cas de sinistre d’un bâtiment, à l’application d’une clause contractuelle prévoyant le paiement d’une indemnité calculée sur la valeur de reconstruction, que celle-ci correspond au coût de remise en état du bien détruit, ne peut valoir enrichissement de l’assuré et ce même si la valeur vénale avant sinistre est inférieure au coût de sa reconstruction »

L‘annotateur rappelle judicieusement :

 « Il n’y a pas d’enrichissement de l’assuré, même lorsqu’il perçoit une indemnité qui va lui permettre de reconstruire un bâtiment après un sinistre, alors qu’il va disposer dans son patrimoine d’un immeuble neuf reconstruit selon les méthodes modernes et au dernier goût du jour, répondant aux dernières normes et doté d’équipements du dernier cri. »

Autrement exprimé et selon les principes du droit des assurances, l’assuré paie une prime, en contre-partie de laquelle l’assureur doit lui remettre une somme suffisante pour le replacer dans la situation qui était la sienne avant le sinistre.

Lorsqu’il s’agit d’un bâtiment, Cette obligation d’indemnisation comporte des sommes suffisantes pour le reconstruire à neuf, dans les limites et sous les conditions prévues par le contrat d’assurance. Il s’avère que l’ampleur des travaux de reconstruction impose l’intervention d’un maître d’œuvre, qui en coordonnera l’exécution.

Il s’agit d’une dépense nécessaire pour la reconstruction de l’immeuble, qui n’est pas concernée par la garantie honoraires d’architecte, dans laquelle l’assureur cherche à la faire entrer.

2/ LE MODE DE CALCUL DE L’INDEMNITE

Le contrat d’assurance tend à verser les indemnités nécessaires à la victime pour qu’elle se retrouve dans la situation identique qui était la sienne avant l’intervention du sinistre. Les travaux qui sont engagés doivent permettre la reconstruction d’un pavillon dans son intégralité pour un coût et pour un montant particulièrement important.

L’Expert de la compagnie d’assurances et l’Expert de l’assuré ont considéré qu’il était nécessaire que les entreprises qui interviendront sur le chantier soient dirigées par un maître d’œuvre qui organisera la coordination des travaux et leurs réalisations, ainsi que cela ressort de leurs évaluations. Cette dépense est par conséquent nécessaire, appréciée par les techniciens et les Experts et par conséquent l’assureur ne peut en aucune manière en contester le bien fondé.

L’assureur invoque souvent une clause qui statue sur le sort des honoraires d’architecte. Mais cette clause est sans lien ni effet sur la prise en charge des frais de maîtrise d’œuvre.

En effet, si un architecte a la faculté d’exercer l’activité de maître d’œuvre, d’autres professions peuvent également l’exercer, et chacune de ces professions ne recouvre pas les mêmes activités. Le seul monopole détenu par les architectes concerne la réalisation et le dépôt de permis de construire.

Mais les assurés peuvent ne pas déposer de permis de construire, ni recourir aux services d’un architecte sauf s’ils en ont l’obligation.

Par conséquent la dépense relative à l’intervention d’un maître d’œuvre ne relève pas de la clause relative aux architectes, mais constitue l’une des composantes nécessaires à la reconstruction de leur bien, comme celle du maçon du couvreur ou du menuisier. L’assureur doit donc régler le coût de la maîtrise d’œuvre qui a été accepté au cours de l’expertise.

3/ LA CONFUSION SOUVENT ENTRETENUE PAR L’ASSUREUR

L’assureur entretient savamment la confusion en déclarant que l’assuré réclamerait le paiement d’honoraires d’architecte. Ainsi que cela vient d’être démontré tel n’est pas l’objet de leur demande.

Le contrat prévoit par voie d’extension une garantie honoraires d’architecte, au terme de laquelle lorsque l’intervention d’un architecte est imposée par un texte, le coût de cette intervention est pris en charge par l’assureur. Pour lui donner un sens, l’assureur tente souvet de se référer aux hypothèses prévues par les textes dans lesquelles le recours à un permis de construire est obligatoire.

Ainsi la clause litigieuse ne signifierait pas que l’assureur paye les honoraires de l’architecte quand la présence de celui-ci est obligatoire, mais dans les cas ou l’obtention d’un permis de construire est obligatoire. Voilà qui manque singulièrement de clarté dans la rédaction du contrat de l’assureur.

Si telle est la volonté de l’assureur, que de limiter la garantie à l’hypothèse ou un permis de construire est obligatoire pourquoi ne pas simplement l’écrire dans le contrat. Sauf à imaginer que d’un point de vue commercial et marketing une telle limitation de garantie serait trop visible et risquerait de nuire gravement à la commercialisation du contrat.

Plus encore cette clause est vide de sens, et sa validité est plus que discutable, voire contestable.

1/ L’intervention d’un architecte est toujours obligatoire pour le dépôt d’un permis de construire, sauf lorsque la surface du bien est inférieure à 170 m².

L’article R.421-1-2 du code de l’urbanisme dispose : « Conformément à l’article 1er du décret n 77190 du 3 mars 1977 modifié, ne sont pas tenues de recourir à un architecte pour établir le projet architectural à joindre à la demande d’autorisation de construire les personnes physiques qui déclarent vouloir édifier ou modifier pour elles-mêmes a) Une construction à usage autre qu’agricole dont la surface de plancher hors oeuvre n’excède pas 170 m² « 

2/ Par ailleurs lorsque la construction constitue la réparation à l’identique d’un bien détruit, il n’est pas obligatoire de recourir à l’intervention d’un architecte.

Selon l’Article L. 111-3 du Code de l’urbanisme,:

« Toutefois, lorsqu’un bâtiment est détruit à la suite d’un sinistre (incendie ou catastrophe naturelle) et à condition qu’il ait été régulièrement édifié, sa reconstruction à l’identique est autorisée, même si les dispositions d’urbanisme ont évolué dans un sens défavorable depuis l’édification du bâtiment et interdisent la reconstruction. »

On est stupéfait de cette découverte. Ainsi en cas de reconstruction à l’identique d’un bien détruit à la suite d’un sinistre il n’est pas nécessaire de déposer un permis de construire, et par conséquent de recourir aux services d’un architecte.

Autrement exprimé, la garantie offerte si généreusement par l’assureur ne permet de prendre en charge les frais d’architecte que lorsqu’ils sont obligatoires, c’est à dire jamais puisque par hypothèse il s’agit de reconstruire un bâtiment détruit par un sinistre, opération pour laquelle il apparaît qu’il n’est pas nécessaire d’obtenir un permis de construire.

Si tel est bien le sens de cette clause, la condition préalable du caractère obligatoire de l’intervention de l’architecte doit être sanctionnée par la nullité et ce sur 2 fondements.

1/ Lorsque des exclusions vident la garantie de son contenu, elles doivent être déclarées nulles et sans effet.

 » …une clause d’exclusion ne peut produire effet dès lors qu’elle prive de toute efficacité la garantie contractuelle ”( Cass, 1ère Civ, 3 juillet 1990, RGAT 1990, 888; Cass , 1ère Civ, 18 février, 1987, RGAT 1988, 364, note R Bout.Cass, 1ère Civ, 19 décembre 1990 ( 4 arrêts ), JCP 1991.II.21656 , note Bigot.)

Un assureur se prévalait de deux exclusions prévues aux conditions générales: l’une relative aux dommages subis par les biens confiés à l’entreprise assurée dans son activité de réparation, maintenance et dépannage hydraulique, l’autre, écartant de la garantie, les dommages dus à l’incendie, à l’explosion, à l’action de l’eau ou d’autres fluides, aux vols, vandalismes et disparitions…… Ces clauses sont sans portée dès lors que  » par leur nombre et leur étendue, les exclusions aboutissaient à priver de tout effet, la garantie souscrite » (Cass, 1ère Civ, 15 décembre 1999, RGAT 1999, note Favre-Rochex.)

2/ L’Article 132-1 du code de la consommation

« Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. »

Cet article a déjà été appliqué à un article d’un contrat d’assurance notamment par la Cour d’Appel de Paris à partir d’un raisonnement qui pourrait être parfaitement reproduit ici.

L’assureur conditionnait le remboursement des honoraires d’expert à la condition préalable de la manifestation d’un désaccord entre l’assureur et son assuré. La cour d’appel de Paris a déclaré cette condition abusive à partir de la motivation suivante ;  (8ème chambre 1er février 2007 AMATHIEU / AXA France)

Considérant que la compagnie d’assurances ne peut pas davantage soutenir avec succès que les clauses litigieuses ont pour objet la définition du risque garanti et sont donc exclues du champ d’application de la législation sur les clauses abusives ;
qu’en effet, elles n’ont pas pour objet de définir le risque garanti, mais les modalités de la mise en oeuvre des prestations prévues par le contrat ; que, par ailleurs, l’assureur perçoit des primes au titre, notamment, d’une garantie d’assistance d’expert pour l’assuré;
Considérant que les deux clauses dénoncées par l’assuré comme abusives le sont effectivement, et pas seulement les dispositions relatives à l’utilité des frais d’expertise engagés par l’assuré et l’accord préalable de l’assureur, comme l’a retenu le premier juge;
Considérant que la première des clauses qui stipule « En cas de désaccord lors de l’instruction du sinistre, l’assuré aura la possibilité de se faire assister par un expert de son choit » en dehors de sa rédaction défectueuse quant au moment exact où se situe ladite possibilité, est abusive en ce sens qu’elle introduit un déséquilibre significatif entre les parties;
Qu’en effet, elle impose à l’assuré, dépourvu de toute compétence particulière en ce qui concerne l’évaluation des dommages, d’attendre, voire de provoquer le désaccord avec l’assureur, professionnel compétent en la matière même s’il n’est pas assisté d’un expert, pour pouvoir lui-même bénéficier de l’avis d’un spécialiste;
Qu’elle a pour conséquence d’exclure, au début de la négociation entre les parties, des compétences techniques équivalentes et pose un préalable abusif à l’égalité entre les parties, à savoir leur désaccord;

En effet on ne peut qu’être surpris d’une garantie d’assurance, offerte en contrepartie d’une prime payée par un assuré, qui ne prévoit sa mise en œuvre que dans des hypothèses qui n’existent pas. Autrement exprimé, il s’agit d’une garantie fantôme puisque littéralement l’assureur n’aurait jamais à payer l’indemnité correspondante.

Par conséquent si les honoraires de maîtrise d’œuvre, entrent dans la définition des honoraires d’architecte, la clause litigieuse comporte une condition nulle, et l’assureur doit prendre en charge les honoraires correspondants.

jcr

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